L'Amour chez Stendhal
Conférence donnée le 28 février 2006
par Jacqueline BALDRAN
Maître de conférences Paris IV
Avant de commencer, je tiens à préciser pour éviter tout malentendu que cette étude se propose d'interroger un aspect moins connu de l'œuvre de Stendhal : ses écrits autobiographiques, sa correspondance, son journal intime et cela dans le cadre du thème proposé, à savoir "Les éducations sentimentales ". Il est évident que cet angle d'approche peut sembler assez réducteur, pourtant il s'agit d'un pan très important de son œuvre qui a fait l'objet de nombreuses et savantes exégèses.
Le roman picaresque ou l’amour confisqué
Conférence donnée le 31 Janvier 2006
par Jacqueline BALDRAN
Maître de conférences Paris IV
Il y a quelque paradoxe à vous proposer, au cours d’un cycle consacré aux éducations sentimentales, un genre littéraire dans lequel on chercherait en vain la moindre trace d’amour.
C’est qu’en vérité dans le monde romanesque de la picaresque, où il s’agit essentiellement de survivre, l’amour n’à nulle place. L'on croise parfois quelques figures féminines, qui pourraient susciter un sentiment amoureux, mais le plus souvent, elles sont des dupes, à moins qu’elles ne soient plus expertes encore que les hommes dans l’art de duper son prochain.
Si le roman picaresque peut trouver sa place ici, c’est en tant que roman de formation, d’éducation. Mais d’une éducation très particulière, qui se déroule dans une période historiquement datée : l’Espagne du Siècle d’or et dans une société qui s’est forgée dans des circonstances historiques exceptionnelles.
Shakespeare et la question de l'absolu : folie et quête d'absolu
Mardi 14 décembre 2010
Par François Laroque
Professeur à l’Université de la Sorbonne Nouvelle-Paris III
Dans les deux premières conférences, nous avons vu que, dans les tragédies amoureuses de Shakespeare, l’amour et le désir constituent une forme de nouvelle religion ou de culte, ou bien qu’ils se trouvent pervertis, comme dans Othello, par ce " monstre aux yeux verts " qu’est la jalousie, ou encore qu’ils s’efforcent en vain de transcender laRealpolitik romaine pour s’affranchir de toutes les limites du monde d’ici-bas, comme dans Antoine et Cléopâtre, où l’amour et le désir s’identifient d’une certaine façon avec l’un des visages de l’absolu par le biais de la coïncidence des contraires ainsi que des noces d’Eros et de Thanatos, de l’amour et de la mort.
Shakespeare et la question de l'absolu : la passion du pouvoir
Mardi 30 novembre 2010
Par François Laroque
Professeur à l’Université de la Sorbonne Nouvelle-Paris III
Je voudrais tout d’abord vous présenter le tableau de la question du politique dans l’histoire telle qu’elle est représentée sur scène dans les pièces de Shakespeare et, en particulier, à partir des trois que j’ai choisies : Richard III, Richard II, et l’horrible, l’affreux, l’abominable Macbeth.
Shakespeare, c’est la fin du XVI° siècle et le début du XVII°, et donc en partie cette Renaissance tardive que connaît l’Angleterre après la Réforme et le début de l’ère jacobéenne, du roi Jacques 1er, lequel succède à la reine Élisabeth à partir de 1603. Dans la conférence précédente, nous avons abordé la question de la tragédie de l’amour, ou le désir, que nous avons essayé d’identifier à une quête, voire à une soif de l’absolu qui ne connaît pas de compromission, qui est prêt à aller au-delà de toutes les limites. Les amants sont poursuivis jusque dans la mort, dans le cadre de l’association des contraires, par Eros et Thanatos, le dieu de l’Amour et le dieu de la Mort, la Mort qui est, pour les Grecs, fille de la nuit et sœur du sommeil, Hypnos.
Don Quichotte ou l'absurde désir d'éternité - Du chevalier à la triste figure
Conférence donnée le mardi 11 janvier 2011
Par Jacqueline Baldran
Maître de conférences Université Paris IV
Avant dire
Il n’est pas de personnage romanesque plus célèbre que Don Quichotte. Nul besoin d’avoir lu une ligne du roman de Cervantès pour connaître sa longue silhouette maigre, juchée sur le dos de son vieux cheval tout aussi efflanqué que lui, et à ses côtés la silhouette replète et pacifique de Sancho sur son âne.
Le roman, paru en 1605, était une parodie géniale de ces romans de chevalerie qui avaient enchanté les précédentes générations avec leurs invraisemblables héros, Amadis de Gaulle ou Palmerin. La vogue de ce genre romanesque était arrivée à son apogée sous le règne de Charles-Quint. La future Sainte Thérèse, Ignace de Loyola, l'empereur lui-même les lisaient, dit-on, avec avidité. Mais dans le courant du XVIème siècle, cette mode commençait à passer. Le goût et les circonstances historiques avaient évolué ; d'autres formes d'évasion sollicitaient les lecteurs, en particulier le roman pastoral ; cependant les exploits de tous ces personnages de papier étaient encore très présents dans toutes les mémoires. Aussi les aventures de Don Quichotte furent-elles saluées par un immense éclat de rire et connurent un succès foudroyant. Deux mois après la sortie de l'ouvrage, l'éditeur dut mettre en chantier une seconde édition, et des éditions pirates se multiplièrent.
Shakespeare et la question de l'absolu : Eros et Thanatos - le désir et ses représentations
Conférence donnée le mardi 23 novembre 2010
Par François Laroque
Professeur à l’Université de la Sorbonne Nouvelle-Paris III
Je souhaite tout d’abord adresser mes remerciements au Forum universitaire et à la ville de Boulogne-Billancourt pour cette invitation à parler de Shakespeare dans le cadre d’un thème exaltant, particulièrement beau, " La quête de l’Absolu " en liaison avec la littérature.
Quand on évoque le nom de Shakespeare, on pense peut-être davantage à la notion d’extrême, de démesure, d’hybris comme on dit au théâtre, qu’à la notion d’absolu.
Nous allons donc voir dans quelle mesure les différentes facettes de son œuvre peuvent recouvrer cette notion d’absolu, qui, elle-même, reste à la fois aussi vaste que vague.
Peter Pan, l'enfant qui ne voulait pas grandir
Peter Pan, ou le garçon qui ne voulait pas grandir
Monique Chassagnol
15 mai 2012
En 1953, le film d'animation de Walt Disney a fixé l'image de Peter Pan dans l'inconscient collectif, si bien que le garçon vêtu de vert et coiffé d'un chapeau à plume en vient à occulter le personnage crée par James Matthew Barrie en 1902 et repris par son auteur au cours des décennies, dans des ouvrages et des textes très divers. De nos jours, Peter Pan, sans cesse adapté et réadapté, continue à apparaître sous forme d'images, de récits, et de multiples objets dérivés.
L'histoire de Peter Pan n'est pas une histoire simple, ni une histoire gaie. Elle parle d'abandon, de mort, d'éternelle enfance, de souffrance aussi, d'impossibilité de grandir, en particulier pour certains garçons, comme pour l'auteur lui-même.
James Matthew Barrie, né en 1860, en Ecosse, de même qu'Arthur Conan Doyle et R.L. Stevenson, est issu d'une famille de onze enfants, très unie. Sa mère, protestante et puritaine, est aussi une grande lectrice qui initie ses enfants à la Bible certes, mais aussi à des lectures très variées, dont celle des romans d'aventures. James n'a six ans lorsque son frère David, la veille de ses quatorze ans, se tue accidentellement en patinant sur la glace, près de l'école dirigée par son frère aîné.
Particulièrement brillant, très prometteur, David était le fils préféré de la mère qui demeure alors prostrée et cesse de s'occuper du reste de la famille. Le petit James, pour tenter d'attirer l'attention de sa mère, de retrouver son amour, reprend le rôle de ce frère mort ; il se met à imiter sa voix, ses expressions, porte ses vêtements et finit par lui ressembler fidèlement. Il joue à être David, comme il jouera, sa vie durant, souvent douloureusement, le rôle d'un autre. Sa mère devient attachée à lui comme elle l'avait été à David. Le lien, réciproque, reste durablement très profond : la première publication de J.M. Barrie est une biographie de sa mère.
Antigone
Conférence donnée le mardi 12 janvier 2010
par Pierre CARLIER
Professeur Université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense
Le cas d’Antigone est assez différent de celui d’Œdipe.
Qu’Œdipe ait eu deux fils et deux filles de Jocaste est une chose qui était connue depuis très longtemps.
Par contre, le fait qu’Antigone ait défié son oncle Créon pour ensevelir son frère Polynice est quelque chose qui n’est pas attesté avant Sophocle, ce qui conduit à se demander si cette présentation d’Antigone refusant d’obéir à une loi injuste n’est pas une invention de Sophocle, et une invention qui a eu un succès considérable et immédiat du vivant de Sophocle.
Les Espagnes de Victor Hugo
Conférence donnée le mardi 28 janvier 2003
par Jacqueline BALDRAN
Maître de conférences Paris IV
Surgie du plus secret de son enfance, l'Espagne irradie toute l'œuvre de Victor Hugo. Elle est l'un des creusets de la mythologie hugolienne.
" Beau pays dont la langue est faite pour ma voix…
Bords où mes pas enfants suivaient Napoléon
Fortes villes du Cid ! Ô Valence, ô Léon
Castille, Aragon, mes Espagnes "
(" Feuilles d'automne ")
La place que l'Espagne occupe dans son œuvre et dans sa vie est sans commune mesure avec le temps réel qu'il y a passé. Il vécut dix mois à Madrid entre 1811 et 1812 et, en 1843, il y fit un second voyage avec Juliette Drouet, voyage qui s'acheva tragiquement, puisque c'est sur la route du retour qu'il apprit brutalement la mort de sa fille Léopoldine.
Que sont les indiens devenus ? A l'écoute de leurs paroles
Conférence donnée le 20 janvier 2004
par Jacqueline Baldran
Maître de conférences Université Paris IV
Introduction
Je remercie Sylvie Petin et le Forum d’avoir accueilli un sujet qui peut vous sembler au premier abord insolite.
A l’origine, ce sujet était un programme, que nous avons proposé à des étudiants de littérature comparée de Paris III-Sorbonne nouvelle : " Textes et luttes des Indiens d'Amérique ".
Ce " nous " n’est pas un pluriel de majesté, mais simplement une précision équitable à l’égard d’une amie et collègue, Florence Delay, avec laquelle je m'étais lancée dans cette aventure.
Je dis " aventure " car nous sommes toutes deux hispanistes et, jusqu'alors, nos connaissances se limitaient aux Indiens d'Amérique Latine. Devant nous s'ouvrait un immense champ de recherches.
C’était il y a trente ans. La date n’est pas anecdotique car, sans le savoir, nous nous sommes retrouvées de plain-pied dans l’actualité.
En effet, en 1970, le grand public était confronté à une nouvelle image de l’Indien, dérangeante, positive, véhiculée par la presse et la littérature. Dans la mesure où cette image était positive, elle mettait à mal un des mythes fondateurs de la Nation Américaine.